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Plantes

Thierry Thévenin, profession paysan herboriste

Cueilleur-herboriste installé dans la Creuse, Thierry Thévenin lutte pour la reconnaissance du métier d’herboriste, mis sous tutelle des pharmaciens, en 1941 par le régime de Vichy. Un combat mené avec le sénateur Joël Labbé, auquel nous devons la loi sur l’interdiction de la commercialisation des pesticides à destination des particuliers, appliquée depuis le 1er janvier 2019. 

Hortus Focus : Pourquoi le métier d’herboriste n’est-il pas reconnu ?

©Lainamac

Thierry Thévenin (Herbes de vie) : C’est un métier qui a officiellement existé. Il a été reconnu par l’État de 1803 à 1941. À cette date, pendant l’Occupation, il a été mis sous tutelle des pharmaciens. Le régime de Vichy a décidé de ne plus délivrer de diplôme, mais de laisser exercer les gens jusqu’à leur mort. La toute dernière herboriste est récemment décédée, à 92 ans. Elle avait obtenu son diplôme en 1941. Donc, officiellement, je n’ai pas le droit de me dire herboriste…

Que risques-tu si tu pratiques ce métier non reconnu ?

Petit saut dans le passé : les bienfaits de la feuille de ronce contre les angines et les maux de gorge étaient connus par toutes les grands-mères du Massif central, y compris la mienne bien sûr. Si aujourd’hui, je vends de la feuille de ronce en conseillant à mon client d’en consommer trois bols en infusion “pour soulager son angine”, je risque 2 ans de prison et 37 500 € d’amende pour exercice illégal de la médecine. Si je le lui “prescris”, j’aggrave mon cas… Je risque jusqu’à 5 ans de prison et 100 000 € d’amende…

Mais tu as le droit de te déclarer paysan herboriste ? C’est kafkaïen cette situation…

En France, on est dans une situation totalement irrationnelle avec les plantes médicinales. Je suis installé comme agriculteur. Le ministère de l’Agriculture gère l’organisme Franceagrimer qui soutient et permet de développer la filière. Nous avons des aides, nous sommes accompagnés par Franceagrimer. Il existe un Syndicat des Simples, soutenu par le Ministère, qui organise, tous les 2 ans, des rencontres autour des plantes aromatiques et médicinales. Et malgré tout cela, je travaille, nous travaillons avec mes collègues dans l’illégalité ! Les plantes reviennent en force dans nos vies, il faut parvenir à faire évoluer ce monopole sur les plantes médicinales exercé par les médecins et les pharmaciens. L’État nous soutient, nous aide à nous développer et, dans le même temps, les tribunaux peuvent nous punir. Ça ne tourne vraiment pas rond.

Les pharmaciens et médecins sont-ils tous arc-boutés sur ce monopole ?

Non, pas tous. Nous travaillons déjà avec certains pharmaciens. Pour info, dans le cursus des médecins, on n’accorde aucune heure de cours à la phytothérapie. Quant aux pharmaciens, les heures d’enseignement sont optionnelles. 

Quelles sont les grandes lignes du combat que tu mènes avec le sénateur du Morbihan, Joël Labbé ? 

Nous travaillons à faire bouger les lignes, à informer sur la nécessité de la reconnaissance du métier d’herboriste comme c’est le cas au Canada, en Belgique… De nombreux jeunes souhaitent se former pour répondre à une demande grandissante des Français. Notre volonté, avec Joël, c’est de réhabiliter cette profession, de faire valider ce qui existe déjà ! Aujourd’hui, plusieurs centaines de personnes sont herboristes sans pouvoir le dire (ou l’écrire !). La légalité, c’est important. Il faut que les gens puissent se tourner vers des professionnels formés et compétents. Il existe un projet de licence pro pour des conseillers en herboristerie, encore faudrait-il qu’ils aient le droit d’exercer. C’est schizophrénique. 

Où est-ce que cela coince ?

Le ministère de la Santé ne veut pas entendre parler d’une nouvelle profession de santé. Et quand Joël Labbé a auditionné au Sénat l’Académie nationale de pharmacie et l’Académie nationale de médecine, on lui a servi un langage de communication bien au point qui peut se résumer à “Les herboristes, c’est une perte de chance pour les Français…”. 

Es-tu anti-allopathie ?

Pas du tout ! J’ai la chance d’avoir une bonne santé, mais en cas de gros pépin, j’irai consulter un médecin. Et jamais, il ne me viendrait à l’idée d’empêcher quelqu’un de le faire ou de me substituer à un médecin. 

 

 

 

Thierry Thévenin est le co-auteur avec Jacky Jousson et Cédric Perraudeau de “Le chemin des herbes – Du Midi à l’Atlantique – Identifier et utiliser 80 plantes sauvages médicinales, alimentaires, tinctoriales” (éd. Ulmer, Collection Vieilles Racines et Jeunes Pousses, 360 pages, 370 illustrations, 30 €). 

 

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